Jisogi

SwatSh : 8/10

Jisogi est un jeu sorti un peu de nulle part (auteur et éditeur inconnus) et qui a fait bien parler de lui lors du salon d’Essen.

Il faut dire qu’il a beaucoup pour séduire.  Un jeu expert dans une petite boite de la taille des Inventeurs du Tigre du Sud avec un matériel somptueux « tout en bois », gravé qui plus est !  Les illustrations très manga viennent soutenir le tout de manière très élégante. 

Mais outre ces considérations esthétiques, Jisogi séduit essentiellement par son thème, magistralement ancré dans les mécaniques du jeu.  Jisogi est une boite produisant des dessins animés manga tombée récemment en faillite.  Les ex-membres du personnel de la boite ont alors fondé de petites boites de production d’animés manga que chacune des joueuses va être amenée à gérer.  Les joueuses commencent donc la partie avec 4 membres du personnel (leurs 4 ouvriers) issus du feu Jisogi et donc démotivés.  Ils sont considérés comme des « fantômes » et ne pourront exécuter qu’une partie des actions quand ils seront placés sur les emplacements d’action.  Il faudra engager de nouveaux membres du personnel, motivés, pour pouvoir réaliser l’entièreté des actions sur lesquelles ils seront assignés.

Chaque membre du personnel a un profil : les scénaristes n’ont accès qu’aux 2 actions de scénario,  les producteurs n’auront accès qu’aux actions de production, les artistes qu’aux actions artistiques et les managers à toutes les actions.  Et une action est disponible à tous.  Jisogi est un jeu de placement d’ouvriers où les emplacements ne sont pas bloqués par les adversaires mais dont le coût sera plus élevé si d’autres s’y sont mis auparavant. 

Les actions vont permettre de récolter les morceaux de scénarios et des styles graphiques nécessaires à la production de dessins animés.  Il sera nécessaire de suivre une certaine mode (objectifs de manche) pour optimiser ses gains et revenus de ses dessins animés.  Chaque partie de scénario a un style (horreur, tranche de vie, action, science-fiction ou fantastique) et la mode va indiquer quelles combinaisons de styles sont les plus en vogue.  Ces 2 actions : écrire le scénario et le dessiner sont évidemment essentielles dans Jisogi et constitueront votre unique source de PVs.  Surtout que vous ne pourrez produire qu’un seul film par manche.  Le jeu se jouant en 4 manches, je vous laisse faire le calcul… 4 films bravo !  Vous ne pourrez produire que 4 films maximum durant la partie.  Vous pourrez vous permettre de ne pas réussir à publier un film lors de la première manche, mais ce sera votre seule marche d’erreur.  Vous devrez absolument produire les 3 autres manches si vous voulez prétendre à la victoire.  Mais outre les PVs que rapportent les publications de dessins animés, ceux-ci rapportent également de l’argent qui est essentiel dans le jeu car non seulement vos actions vont vous coûter de l’argent mais votre personnel demandera le paiement d’un salaire à chaque manche.  Vous ne pourrez pas faire autrement que d’engranger des dettes pour pouvoir payer tout ça.  Mais attention à les rembourser régulièrement sinon leurs intérêts risquent de vous ruiner.  Il n’y a pas à dire, la gestion de l’argent d’une maison de production de dessins animés est très difficile 😉

Enfin, la petite touche « Jisogi » qui rend le jeu très attachant, quand on publie un film, on doit avoir une combinaison de 3 tuiles: le lieu de l’intrigue, l’histoire et le twist. Le truc vraiment sympa c’est que ces 3 tuiles comprennent un texte d’ambiance et il est conseillé (fortement) de raconter l’histoire de votre film en brodant autour de ces 3 tuiles lorsque vous le publiez. Ca n’apporte rien mécaniquement, mais ça le fait 😉

De plus, il va vous falloir engager du nouveau personnel si vous voulez avoir plus d’actions et les rendre plus efficace.  OK, le nouveau personnel est plus coûteux mais l’investissement en vaut la chandelle.  J’ai trouvé ça un peu dommage car Jisogi en devient un peu stéréotypé : 1^er tour on essaye d’engager 2 nouvelles recrues et on limite les dépenses pour le reste des actions.  Et les 3 prochains tours on publie à chaque fois un nouvel animé, on essaye de suivre les nouvelles tendances et d’être le plus souvent possible première joueuse pour pouvoir grapiller les bonus de publication.  Et pour le reste, on continue de former ses ouvrières et d’optimiser ses actions pour avoir le plus de bonus possible tout en gérant son argent au mieux pour ne pas finir endetté.

J’ai trouvé dommage que Jisogi ne laisse pas plus la place aux stratégies différentes.  Les parties se ressemblent fort et ce n’est pas la meilleure stratégie qui l’emportera mais bien la meilleure gestion.  Il n’y a qu’une stratégie dans Jisogi : former son personnel et engager au moins une nouvelle personne (idéalement 2) au premier tour puis publier des animés à chacun des 3 prochains tours, leur faire suivre un maximum la mode et veiller à être dans les premiers joueurs à chaque fin de manche.  Le joueur qui arrivera à faire ça en dépensant un minimum remportera la partie.  Ceci limite la rejouabilité même si les pouvoirs variés de certains employés sont très sympas à jouer. De plus, raconter son scénario à chaque publication est assez unique et amusant dans ce genre de jeu. Faites attention aux cartes à effets uniques car certaines permettent de devenir premier joueur même si un joueur aura fait l’effort de sacrifier une de ses actions pour le devenir.  Ca peut être frustrant…  Surtout qu’être dans les premiers joueurs peut faire la différence en fin de partie qui se joue généralement à un point près ou même au plus riche (le jeu ne permet pas de dépasser les 29 points ce qu’on peut atteindre assez facilement, les égalités se déterminent alors au plus riche).  Jisogi plait néanmoins beaucoup grâce à son matériel splendide et surtout grâce à l’imbrication du thème dans les mécaniques qui fait qu’on ne peut que se sentir proche de ces producteurs de mangas animés.