Bacchanalia
SwatSh: 3/10
J’avais lu peu de choses sur Bacchanalia. Juste une petite news sur Je dis Jeux qui parlait d’un jeu narratif tout en restant assez vague. Cela a suffit à égayer ma curiosité. Lorsque je suis passé devant le stand de cet éditeur inconnu, j’ai voulu en savoir plus. Un bonhomme a commencé à nous expliquer le jeu dans un anglais/italien assez spécial. Après 5 minutes, je me suis tourné vers Philrey qui avait l’air captivé par ce que le gars racontait et lui ai demandé en français: « tu comprends quelque chose toi? ». Il m’a répondu par la négative et a demandé au gars de parler moins vite. Ce qu’il a fait mais on ne comprenait pas plus! Ca commençait bien!
Légèrement dégoûté, nous avons voulu passer à autre chose lorsque le type nous a arrêté et nous a montré sa belle machine: son iPad. Il a alors lancé la caméra et a filmé la boite du jeu (format jeu de cartes). Et, magie, cette boite a commencé à s’animer à travers l’iPad. Puis, il a filmé une carte et à travers l’iPad, cette carte s’est ouverte et la règle relative était affichée (cfr photos en bas). Nous étions bluffés. Il n’en fallait pas plus pour que je prenne le jeu!
Au soir à l’hôtel, je n’y tenais plus. J’ai alors sorti le jeu, bluffé mes amis avec l’histoire de l’iPad puis Ren s’est plongé dans les règles (il aime bien ça ;-)).
Pendant que Ren lisait les règles, j’ai alors commencé à regarder la boite du jeu de cartes et c’est alors que l’étonnement continua: 2 à 3 heures de jeu (pour un jeu de cartes!) et âge minimum 18 ans!!! Les règles font … 40 pages!!! Et ces règles sont fabuleuses! Elles racontent des histoires: le joueur peut alors dire « … » durant 3 pages ou bien « … » durant 3 autres pages. Ce livret de règles ne contient aucune règle!!! Uniquement des tas de petites histoires que les joueurs pourraient éventuellement se raconter. Et ces histoires sont aussi incompréhensibles que pas piquées des vers. Extraits:
– « Venus aussi est venue à Bertinoro, attirée par les liaisons adultères et les orgies sexuelles qui ont embrasé la ville et par sympathie envers les amours lésés par les événements de la bacchanale »
Imaginez qu’après 1/4 d’heure de lecture, vous n’avez toujours rien compris et que vous lisez:
– Au bout d’un moment vous allez sûrement narrer une scène qui comportera un personnage dont vous n’avez plus la carte Deus. Le personnage peut rester, partir ou tout ce que vous voulez tant que cela respecte ce que dit l’Aruspice. La seule exception concerne l’Amans: vous pouvez le faire rester, partir ou tout autre chose (si l’on ne vous dit pas l’inverse) ou alors les règles doivent vous y autoriser. Exemple: Sarah peut narrer une scène où Petronius est dans une taverne puis certains soldats arrivent même si elle n’a pas de carte Deus Miles. Ou alors elle peut décrire les prétoriens qui continuent de poursuivre Petronius même si elle perd la carte Miles. Tout est bon, tant que cela respecte l’Aruspice.
Nous sommes partis de fous rire en fous rire. C’était merveilleux! A la fin des règles, on n’avait toujours rien compri mais qu’est-ce qu’on avait bien ri. On a rangé le jeu dans sa boite et on est passé à autre chose … les larmes aux yeux.
Philrey212:
Rien à dire de plus. Un vrai moment de plaisir de voir ses amis pleurer de rire. SwatSh, à en recracher sa gorgée d’eau. L’histoire était « contagieuse » car à la table d’à côté, plongés dans des règles de … Sibéria? … ces messieurs furent interrompus et commencèrent à écouter. A moins que ce ne soient nos fous rire qui perturba leur concentration.
Bref, un pur moment de rire qui valait largement la dépense. Et grâce à l’excellente lecture de Ren qui réussit à garder un peu de sérieux malgré nos éclats de rire. Mais il n’a pas tenu non-plus jusqu’au bout!
PS: Je ne cote pas le jeu puisque nous avons rangé la boîte, à défaut de comprendre exactement par où commencer!
Ren: 10/10
Attention chef d’oeuvre. Ou plutôt « private » chef d’oeuvre, comme dans private joke. Ce jeu m’a en effet permis de vivre un moment comme on en vit rarement, et que je raconterai avec joie et bonheur dans 50 ans à mes petits-enfants (voire arrières-petits-enfants, sorry si je mets les tirets au mauvais endroit), un soir au coin du feu, quand il pleut et il vente dehors, par une sombre soirée d’hiver où on est bien contents d’être au coin du feu justement.
Je ne vais pas raconter les circonstances qui ont fait que nous avons rencontré le jeu, Swa les a décrites plus haut. Or donc nous nous retrouvâmes le jeudi soir, à l’auberge bien nommée « Schlöss », la tête déjà remplie des bons souvenirs de notre journée passée à arpenter les palais immenses du mythique salon d’Essen. L’heure est déjà bien avancée, nous avons commandé à manger (ou nous avons déjà mangé, je ne sais plus), nous nous demandâmes donc: mais que pourrions-nous faire pour agrémenter plus encore cette merveilleuse journée? L’un de nous a un éclair de génie: « et si on jouait à un jeu? » Suggestion immédiatement adoptée par l’ensemble des troupes. Mais quel jeu? C’est the question! Swa a alors sorti un argument imparable avec sa carte filmée qui lance une animation sur l’iPad. Impossible de résister, nous étions subjugués, il fallait que nous jouiions à Bacchanalia. Malgré l’heure tardive, malgré les vapeurs d’alcool et de dro… oups sorry de jeunes lecteurs pourraient être parmi nous, bref malgré les circonstances tout à fait contraires, nous nous lançons. Et comme nous n’avons peur de rien à Vin d’jeu, nous n’avons pas été rebutés par le livret (très) touffu de régles, et la complexité du jeu, complexité qui perlait déjà à la surface en lisant la description du jeu, et que nous n’allions pas tarder à découvrir pleinement.
Aimant en effet lire les règles et en abreuver mes amis, je me propose donc comme héraut. Est-ce mon charisme indicible, mon sens de la persuasion incroyable, mon éloquence brillante, mon regard de braise ou, plus prosaïquement, l’abattement complet de mes camarades après une journée harassante et leur bienveillance face à mon envie toujours renouvelée de faire le malin? Bref tout le monde est d’accord, et je commence la lecture. Et c’est à partir de ce moment que nous sommes entrés dans la 4ème dimension. Les premières minutes se déroulent normalement, même si on sent rapidement que ça ne va pas être facile. Il y a beaucoup de cartes différentes, beaucoup de concepts, les liens ne sont pas du tout clairs, on n’est pas dans du kubenbois germanique, bref va falloir s’accrocher. Et devant moi, au lieu d’accrocher, je vois plutôt des machoires qui décrochent. Puis, peu à peu, des phrases surréalistes apparaissent. D’abord timidement, puis de manière de plus en plus affirmée, pour finir en feu d’artifice, comme dans la phrase citée par Swa, que je ne résiste pas au plaisir de vous resoumettre: « Au bout d’un moment vous allez sûrement narrer une scène qui comportera un personnage dont vous n’avez plus la carte Deus. Le personnage peut rester, partir ou tout ce que vous voulez tant que cela respecte ce que dit l’Aruspice. La seule exception concerne l’Amans: vous pouvez le faire rester, partir ou tout autre chose (si l’on ne vous dit pas l’inverse) ou alors les règles doivent vous y autoriser ». Honnêtement je peux dire que nous sommes un groupe de joueurs ouverts. On ne fait pas que du calculatoire, on fait du party game, du court, du long (fouillez le site, vous trouverez des jeux pour tous les goûts!) mais ça, je n’avais jamais vu de ma vie! Pour les plus cultivés d’entre vous, ces règles sont dignes du Calvinball (cfr Calvin & Hobbes). Faites ce que vous voulez, ou bien tout le contraire, du moment que les règles ne vous disent pas autre chose, sachant de toute manière que je ferai différemment!!! Ce sont en fait des règles évolutives, qui vivent leur propre vie.
Et maintenant remettez ça dans le contexte: vous entendez (ou lisez dans mon cas) cela après une longue journée ludique, entourée de vapeurs diverses, dans la torpeur de la digestion après un bon steak, dans une atmospère chaleureuse (Schlöss das is gut!), ben ça part en sucette, pas moyen de faire autrement. Et j’ai essayé de garder mon sérieux le plus longtemps possible, mais à un moment ce n’était plus possible, j’avais les yeux embués de larmes tellement on rigolait. On était tous pliés en 4, tordus de rire. Un moment vraiment magique. Et, encore plus merveilleux, toute la salle autour de nous aussi! Nos voisins s’étaient lancés dans un Siberia, ils ont dû arrêter pendant 15 minutes tellement on faisait du bruit. Et tellement ils avaient envie de rire aussi! Madame et Monsieur Ludigaume themselves avaient le sourire, malgré le fait qu’ils étaient de l’autre côté de la salle. Bref un moment de pur bonheur, les larmes me reviennent presqu’aux yeux rien qu’en écrivant ces lignes!
J’ai joué des centaines de parties de Puerto Rico ou Agricola. Du lourd, du kubenbois qui vous donne un bon gros plaisir ludique, un plaisir puissant du type « si je leur ai mis une raclée, c’est parce qu’ai mis une meilleure stratégie en place parce que c’est moi le plus fort » (petit hommage à Mario Ramos qui vient maheureusement de nous quitter). Des centaines de parties de Times Up, ou Unanimo, ou Loups Garous. Du léger, du party game qui vous donne du fun, du plaisir, du rire, de la convivialité, ou tout à la fois. J’ai joué des milliers de fois dans ma vie. Mais jamais je n’ai eu une sensation aussi forte qu’à la lecture des règles de Bacchanalia. Rien que pour ça, je mets un 10/10 bien mérité, merci Paul Czege et Michele Gelli.
Quant à un avis sur le jeu, adressez-vous à quelqu’un d’autre, nous on n’y a pas joué.
Un scan avec l’iPad sur la boite, et tout s’anime!
Ici, l’iPad a scanné une carte et les règles de la carte s’affichent! Magique!
Noter que le jeu se vend avec une bouteille de vin!!! (ne cherchez pas le lien sinon que ce jeu était fait pour nous ;-))