Thebai

SwatSh : 8,5/10

Avec des jeux de la qualité de Windmill Valley, Nucleum ou Minos pour ne citer qu’eux, nous suivons toujours attentivement les sorties de Board & Dice et d’Intrafin qui les localise en Français.  Thebai est leur dernière sortie, présentée au dernier salon d’Essen.  De plus, l’auteur de Thebai, David Turczi, est un auteur que nous apprécions particulièrement chez Vin d’jeu grâce à des jeux comme Imperium, Nucleum ou Voidfall par exemple.

Dans Thebai, David a voulu faire quelque chose de différent.  Il s’agit d’un jeu de pose d’ouvriers où, un peu comme dans Tianxia, les joueurs vont devoir contrer des attaques d’envahisseurs.  Mais ici, chacun pour soi !  Les envahisseurs ont une certaine force et si vous avez suffisamment de force pour contrer, vous gagnez des PVs, sinon vous en perdez.  Thebai se joue sur 10 tours et, à chaque tour, vous placez un dé ouvrier et réaliser la ou les actions associées.  Puis vous allez déplacer un pion pour obtenir l’effet de la tuile sur laquelle il arrive.  Ensuite, a lieu une sorte d’événement que tout le monde a pu voir à l’avance depuis 5 tours pour pouvoir bien anticiper.  Ces événements vont rapporter des ressources ou PVs selon certaines conditions ou déclencher une phase d’attaque des envahisseurs.  Donc : 10 manches – 10 actions, voilà qui semble assez simple.  C’est sans comptez les effets et conséquences de chaque action.  Un peu comme dans Minos, vos tours vont de temps en temps durer très longtemps grâce aux combos que vous allez générer et des décisions qui en découlent.

Une ouvrière peut être placée sur le plateau ou sur votre plateau personnel.  Une ouvrière placée sur le plateau va activer les tuiles adjacentes qui vont généralement apporter des ressources, permettre d’augmenter la valeur de vos ouvrières ou de vos soldats ou de placer des soldats.  Une ouvrière placée sur votre plateau personnel va permettre de placer des tuiles de son plateau personnel vers le plateau commun, de réaliser des contrats, d’augmenter sur les échelles, de placer des soldats ou de gagner des ressources.  Les joueuses devront faire souvent face à ce dilemme entre placer une ouvrière sur le plateau commun ou sur son plateau personnel.  Les deux options offrent des choix intéressants et qui pourront avoir, plus tard, leur conséquence…

Jusque là tout est assez classique à part que la valeur de vos dés ouvrier va évoluer et quand un dé atteint sa valeur maximale, un peu comme dans Teotihuacan, il s’en va en retraite et, dans Thebai, il va au panthéon là où il pourra prendre une place pour gagner des PVs selon certaines conditions.  Dans Thebai, on n’est pas puni quand un ouvrier s’en va au panthéon car on récupère toujours gratuitement ses ouvriers.  On a plutôt même intérêt à les y envoyer mais il faudra être ingénieux pour y arriver 😊

Enfin, pour moi, le plus original dans Thebai est son jeu de contrats.  Thebai est en effet rythmé par la réalisation de contrats.  Vous allez souvent, comme bonus, recevoir de nouveaux contrats.  Tout contrat non rempli à la fin du jeu vous coûtera de nombreux PVs.  Vous serez donc un peu obligé de les remplir.  Et comme vous en recevrez à de nombreuses occasions, vous dépenserez beaucoup d’énergie à les remplir.  Généralement, les contrats demandent de dépenser des ressources spécifiques.  Il faudra donc aller les chercher.  Mais ce qui est très chouette dans Thebai, et assez unique il faut le dire, c’est qu’il existe 4 couleurs de contrats et chaque couleur vous offre un axe stratégique.  En effet, remplir un contrat ne permet pas tout simplement de gagner des PVs, cela offre des effets.  Et chaque couleur de contrat offre des effets de types différents.  Quand vous gagnez un contrat, vous allez le choisir parmi 4 face visible, vous pourrez donc viser les effets qui vous intéressent le plus quant à l’axe stratégique que vous privilégiez ou pour remplir un besoin plus court terme.

Dommage que le jeu ne soit pas très joli et que le thème ne soit pas mieux soutenu dans les mécaniques du jeu.  Sa gestion des combos et des bonus est très chouette même si certains tours de joueurs peuvent être très longs.  L’interaction, indirecte, est un peu présente grâce au placement des ouvriers et des tuiles sur le plateau commun, au choix des contrats ainsi que pour la dispute des places dans le hall of fame.  Généralement, un jeu rythmé par la résolution de contrats ne m’attire pas spécialement car il est souvent trop tactique.  Et pourtant, c’est dans la gestion des contrats que Thebai séduit le plus.  Pouvoir orienter sa stratégie en choisissant les contrats qui vont la soutenir grâce à leurs effets de résolution est tout un art dans Thebai et apporte une belle originalité au jeu et une belle envie d’y revenir. 

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Clem : 8,5/10

Ce qui est surprenant avec Thebai c’est le contraste entre l’apparente simplicité des règles et la profondeur et la richesse des choix stratégiques qu’il offre.

En effet, le tour d’un joueur se décompose en 2 à 4 étapes. Thébai repose sur une mécanique de dés actions et la première étape est réalisée uniquement si le joueur n’a plus de dés action en réserve. Contrairement à d’autres titres où le fait de « rebooter » constitue une action, ici il s’agit juste d’une étape et le joueur pourra ainsi jouer une action au même tour que la récupération de dés actions. La seconde étape consiste à utiliser un dé action sur son plateau ou sur le plateau central. Le plateau d’un joueur offre au début du jeu 3 emplacements d’actions, puis au fur et à mesure de la partie des tuiles bâtiments vont être construites et déplacées du plateau joueur sur le plateau central, libérant ainsi de nouvelles actions. Sur le plateau central, un dé peut activer un (gratuite) ou deux bâtiments (contre paiement), selon son placement.

La 3^ème phase, également obligatoire, consiste à déplacer son archonte (magistrat) sur une tuile bâtiment du plateau central pour réaliser l’action qui y est représentée. La 4ème phase autorise à réaliser une action disponible de plus de son plateau via l’utilisation d’un dé bonus « one shot » préalablement récupéré par la montée sur les 2 pistes du jeu. Enfin, Thebai propose un système de validation d’une carte « contrat » à chaque manche. En payant son coût en ressources, les joueurs obtiennent des points ou des effets immédiats, tout en préparant leur scoring de fin de partie par la collection de symboles présents sur les cartes (1 par carte parmi 4 symboles différents).

Rien d’insurmontable donc, mais Thebai se complexifie avec le nombre d’actions disponibles sur le plateau joueur et le plateau central qui s’accroît au fil de la partie, offrant toujours plus de choix aux joueurs. Or, qui dit choix nombreux, dit longues réflexions et immanquablement « analysis paralysis ». Avec ses 10 manches et une durée moyenne de 75 minutes par joueur, le jeu s’adresse clairement aux amateurs de parties longues. Souvent, dans les jeux experts il est possible de planifier sa stratégie pendant le tour des autres joueurs. Malheureusement, Thebai se révèle aussi très chaotique : le placement des dés et les déplacements des archontes peuvent bloquer certaines actions du plateau central, rendant toute planification à long terme hasardeuse. Lors des premières manches on s’aperçoit rapidement que ses plans peuvent vite s’effondrer à cause des actions des adversaires. Il est d’ailleurs tout à fait possible de « pourrir » — volontairement ou non — les plans des autres, forçant chacun à repenser sa stratégie en permanence.

Néanmoins, si l’on accepte cet état de fait, Thebai est un jeu très riche en termes de stratégies. En effet, en plus des dés actions, les joueurs possèdent également des dés militaires. Dans Thébai le thème est quand même présent à travers la lutte entre les 2 descendants d’Œdipe dont un gouverne la cité et l’autre l’assiège. Ainsi, les joueurs doivent organiser une défense pour résister aux 4 assauts du frère assiégeant se déroulant au manches 3, 5, 7 et 9. Et si un joueur ne participe pas assez à la défense, il peut perdre des points. En revanche, quand on oppose une force militaire conséquente cela peut être très lucratif avec gain de points de victoire, de bonus et même de tuile porte (celle qui est attaquée) apportant un symbole joker pour le scoring des contrats en fin de partie.

J’ai particulièrement bien aimé le système de progression des dés (actions et militaires) qui vont progresser jusqu’à être retirés du plateau. Certes, c’est une mécanique déjà vue mais qui fonctionne très bien dans Thebai. Les dés actions qui disparaissent vont se placer au Panthéon qui correspond à une zone d’objectifs pour un scoring de fin de partie. Les dés militaires sont remplacés par des généraux plus puissants qui vont se retrouver affectés à une porte, offrant par la même occasion la possibilité de recruter un héros offrant bonus immédiat et/ou permanent au joueur. On va donc vouloir faire mourir ses dés 😉, mais pas trop vite quand même, il faut trouver le bon timing. Le placement des dés sur le plateau est également très intéressant car il va également interagir avec le déplacement des archontes. Ils vont pouvoir traverser les dés et les faire progresser si ce sont des dés adverses ou régresser si ce sont ses propres dés… Comme les joueurs doivent forcément déplacer leur archonte à chaque tour, cette phase ajoute également une couche tactique supplémentaire et un degré de complexité supplémentaire.

Thebai propose également de nombreux effets permanents, qui s’acquièrent avec la progression sur les 2 pistes du jeu, pour une montée en puissance progressive. En revanche, la gestion des ressources reste tendue tout au long de la partie. Thébai offre donc un challenge en termes de gestion et de choix stratégiques pour essayer de faire combotter les nombreux effets entre eux et optimiser son tour de jeu. Maître Turczi propose donc avec Thébai un jeu expert de très bon niveau. Le seul petit bémol réside, à mon sens, dans le côté très chaotique et la difficulté de planifier à long termes allongeant ainsi les tours et le temps de la partie.

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Beaucoup de gens avec qui je parle de Thebai ratent le fait que les contrats offrent un axe stratégique. C’est vrai que ce n’est pas du tout habituel mais c’est dommage de passer à côté de ça car on rate un aspect fondamental du jeu. Comme vous le voyez ci-dessus, les contrats rouges vous permettent d’avancer sur les échelles, les bleus soutiennent l’axe militaire, les verts se focalisent sur les PVs et le « vieillissement » des ouvriers et les oranges sur la pose et la défausse de tuiles.