Yunnan
SwatSh: 8,5 /10
Yunnan est la sortie d’Essen de cette année de ce petit éditeur de qualité qu’est Argentum Verlag. Chaque année, cet éditeur nous sort un bon jeu que je suis toujours curieux de découvrir. Les 2 meilleurs jeux d’Argentum sont pour moi Coney Island et Hansa Teutonica East Expansion. Et cette année, Argentum Verlag a fait fort puisqu’ils ont édité une boite rien qu’en français. Moi je dis bravo! Bien que ce soit assez inutile vu qu’aucune pièce ne contient de texte, une boite multilingue aurait suffit. Enfin, je ne suis pas éditeur 😉
Yunnan est une très bonne surprise pour moi. Pourquoi? Parce que Yunnan comporte 2 phases dont la première est une phase d’enchères et je dois avouer que je ne suis pas un grand fan des enchères. J’étais donc pas hyper chaud pour y jouer. Et comme Yunnan m’a bien plu, c’était donc une surprise, bonne qui plus est 😀
En fait, la phase d’enchères consiste en des enchères sans en être. Une sorte de truc bizarre qui est un mixte entre jeu d’enchères et actions avec un coût variable. A votre tour, vous placez un de vos négociants sur une des 5 actions possibles. Chaque action comporte 5 valeurs qu’il va falloir payer en argent si on réalise l’action: 5, 7, 9, 12 et 15. On ne peut poser un négociant sur les valeurs 5 et 7 que si on est le meilleur enchérisseur. Si quelqu’un surenchérit sur vous alors que vous êtes sur les valeurs 5 & 7, vous récupérez votre négociant mais si vous êtes sur 9 ou plus, votre négociant y restera quoi que vos adversaires paieront. Ce système un peu spécial revient à dire que si vous voulez être sûr de réaliser une action, vous devrez payer le prix (minimum 9) mais vos adversaires devront encore payer plus chez s’ils veulent réaliser la même action. Si par contre vous voulez « tenter le coup », choisissez une action moins prisée à ce moment du jeu et proposez le minimum. Avec un peu de chance on vous laissera cette action pour pas cher.
La seconde phase consiste au déplacement de vos négociants le long de la route du thé. Peut-être l’avez nous remarqué mais durant la phase d’enchères le même mot est apparu: « négociants« . Oui, vous allez devoir placer des négociants durant la phase d’enchère et en déplacer durant la phase de voyage, et pas les mêmes! Premier élément très intéressant dans Yunnan: la gestion de vos négociants. Vous allez devoir trouver le juste équilibre entre le nombre de négociants à utiliser durant les enchères (évidemment on a envie de réaliser toutes les actions ;-)). D’un autre côté les négociants qui voyageront vous feront gagner de l’argent. Et la gestion de son argent est le second élément très intéressant dans Yunnan. En effet, votre argent vous sert à 2 choses: D’abord à payer vos actions mais aussi à gagner des PVs car à la fin de chaque tour vous allez devoir décider de la répartition entre les PVs et l’argent de vos points gagnés ce tour-ci au cours de 1:1. Evidemment, au début du jeu vous allez ne récolter que de l’argent mais il vous faudra décider au bon moment de vous lancer aussi dans les PVs car si vous vous y lancez trop tard, vous risquez de voir filer vos adversaires…
Mais les qualités de Yunnan ne s’arrêtent pas déjà là. Le thème est très bien choisit et très bien rendu. On y est sur la route du thé de l’Himalaya à grimper péniblement avec son cheval pour pouvoir vendre du thé le plus loin possible. L’interaction entre les joueurs n’est pas négligeable non plus. Non seulement on va se battre pour les actions durant la phase d’enchère, mais durant la phase de voyage, le joueur avec le plus d’influence pourra faire redescendre certains négociants adverses. Et puis celui qui sera arrivé le plus loin pourra construire avant les autres et profiter des cadeaux. Il y a donc une certaine course à vouloir être le premier le plus loin possible sur cette route. Il n’y a aucun hasard dans le jeu et les choix sont suffisamment nombreux pour être intéressants. Une vision long terme est nécessaire et certaines stratégies différentes peuvent s’affronter sans être très nombreuses néanmoins. Sa seule faiblesse est pour moi sa rejouabilité qui ne se situe qu’au jeu et choix des adversaires ce qui peut amener le jeu à être un peu répétitif après une dizaine de parties avec les mêmes joueurs.
Yunnan offre un plaisir de jeu inédit. Yunnan est donc bel et bien une très belle surprise et aussi belle réussite.
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Philrey212: 8/10
A vrai dire, je n’étais pas très enthousiaste à entamer une partie de Yannan. En effet, la lecture des règles (en diagonale) pour Essen 2013 ne m’avait pas trop emballée. La raison, à mon souvenir, à l’époque était ces phases « d’enchères » pour toutes les actions. Et bien, finalement, c’est une excellente surprise et je remercie SwatSh de l’avoir proposé.
Bon, il y a en effet cette enchère mais elle a la particularité d’être « à moitié ». En effet, dans les 5 « maisons » du plateau, si un joueur place un ouvrier sur une des 2 portes plus petites, il prend le risque de se faire éjecter en cas de surenchère. Mais évidemment, le coût de l’enchère est moindre. Le joueur prend donc un risque. S’il veut éviter ce risque, il doit se placer sur une autre porte (plus grande), avec une valeur de 9 ou plus. Dans ce cas, il s’assure de faire l’action, même s’il y a un autre joueur qui place sur une porte supérieure (ce dernier paiera simplement plus cher son action).
Autre aspect, assez troublant au départ d’ailleurs, est l’ordre du tour. En effet, le premier à placer ses négociants sur les actions sera le dernier à se déplacer sur la route du thé. Alors, s’il est clair qu’il est préférable d’être premier pour les enchères des actions, ce n’est si évident en ce qui concerne les déplacement sur la route du thé. Il peut s’avérer être le premier pour ainsi l’être aussi dans une province (afin de par exemple construire une cabane à thé en premier afin d’être protégé lors du passage éventuel du collecteur de taxes) mais également dernier (surtout si ce joueur en question est plus fort que ses adversaires car il pourra ainsi faire reculer les négociants et briser une chaîne, diminuant ainsi le revenu de ces adversaires). Pas du tout simple donc comme concept. Par contre, il m’a fallu quelques tours pour bien comprendre l’ordre des différentes actions (sans doute dû à la fatigue 😉
Dernier élément surprenant: l’argent. En effet, en fin de tour, on gagne de l’argent. Ce n’est pas tout à fait vrai. Le joueur a le choix entre gagner une valeur en argent ou en PV ou encore une combinaison des deux. Donc, le fait de « contrôler » les provinces est très important.
Ce sont là les éléments principaux de Yunnan. Il faut ajouter à cela quelques détails, important dans la stratégie du joueur (banque, longueur des déplacements possible, force politique (s’il s’agît bien de politique, pas certain) pour faire de Yunnan une belle réussite.
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Ren: 8,5 /10
Dans Yunnan les joueurs incarnent des négociants de thé de la province du Yunnan (quelle surprise), désireux de vendre leur bon thé (Pu’er ©) dans le lointain Tibet. Pour ce faire il faudra optimiser au mieux ses choix à chaque tour (aucun hasard dans le jeu, à signaler), pour évidemment obtenir le maximum de points de victoire à la fin. Le premier joueur atteignant 80 points gagnant la partie. Chaque tour de jeu se déroule en plusieurs phases:
Tout d’abord les enchères, phase cruciale du jeu. Chaque joueur va placer à tour de rôle un de ses négociants (on en a 3 au départ) pour essayer d’améliorer son jeu et/ou recevoir des sous de la banque. Il y a 5 endroits différents (en plus de la banque): on peut recruter un nouveau négociant (jusque 7 max), avoir un visa pour pouvoir passer les frontières (=aller plus loin), faire avancer son cheval (le cheval étant l’éclaireur, i.e. celui qui indique jusqu’où on peut vendre du thé), aller à la maison du dragon (pour augmenter son influence, et ainsi éviter de se faire rétrograder par un autre joueur sur la route du thé, voire carrément rétrograder soi-même un autre joueur), aller au chantier de construction pour acheter un pont (permet de prendre des raccourcis sur la route du thé), une maison de thé (permet d’amadouer l’inspecteur des impôts qui sinon fait payer le joueur qui reçoit le plus de revenus sur la route du thé) ou un comptoir (pour générer des revenus, qui seront changés en argent ou en points de victoire, selon le choix du joueur). Il y a plusieurs astuces dans ces enchères: à certains endroits, on ne peut enchérir que si on paye plus que le pion le plus cher déjà placé. A ces mêmes endroits, si quelqu’un enchérit et dépasse l’enchère déjà faite d’un autre joueur, ce dernier récupère son pion et pourra le rejouer à son tour (à la Lancaster). A d’autres endroits tous les emplacements sont disponibles sans règle particulière. Sachant bien évidemment qu’on ne peut enchérir que si on a les sous. Et qu’on a du coup rarement l’occasion de faire tout ce qu’on veut, que ce soit par manque de sous ou parce que les autres ont justement pris la place qu’on voulait (les salauds, ils l’ont fait exprès en plus). Bref les enchères sont presque un jeu en elles-mêmes, et crucial évidemment puisque ça conditionne toute la suite.
La suite justement. On résout les enchères (on reçoit ses négociants, ses sous, on avance sur la piste d’influence à la maison du dragon…) puis on entame le voyage, dans l’ordre inverse de l’ordre dans lequel les joueurs ont passé à la fin des enchères, ordre qui a toute son importance (vous suivez toujours?). Concrètement les joueurs déplacent leurs négociants (je ne l’ai pas dit mais plus loin on va pour vendre son thé, plus ça rapporte) et construisent des structures (ponts, maisons de thé et comptoirs). Sachant que tous les négociants doivent toujours être connectés entre eux. Et sachant que les joueurs ayant le plus d’influence peuvent éjecter un négociant du joueur le plus.
Ensuite l’inspecteur fait son office, il fait payer le joueur qui génère le plus de revenus dans la ville qui génère globalement le plus de revenus (sauf si ce dernier a construit une maison de thé).
Puis on récolte les cadeaux (présents sur le plateau dans les provinces, « first in first served », ils donnent des points à la fin de la partie).
Puis on calcule les revenus de chaque joueur, chacun décidant de transformer cela en argent ou en points de victoire, selon la répartition de son choix.
Et le premier à 80 points a gagné (ou celui qui a le plus de points si plusieurs joueurs dépassent 80 points le même tour).
Au final on a un très bon jeu. Beaucoup de mécanismes différents entrent en action. L’interaction entre joueurs est énorme, tant de manière directe (éjecter quelqu’un lors de la phase d’enchères, faire rétrograder un négociant adverse lors du voyage…) qu’indirecte (toujours suivre ce que font et vont faire les autres). Il n’y a pas de hasard. Il y a manifestement plein de voies différentes pour gagner. Il est à la fois stratégique (indispensable de s’orienter plus ou moins dans une voie pour avoir une chance de gagner) mais aussi tactique (beaucoup d’optimisation à chaque tour). Le tout sans aucun hasard.
Il y a 3 petits points qui m’empêchent de le considérer comme un carton absolu. De 1 les règles ne sont pas des plus digestes, ça donne donc juste une toute chtite impression de lourdeur désagréable. De 2 le plateau (niveau design) ne me parle vraiment pas. Ca plus les bêtes meeples carrés, ronds, hexagonaux, huttes, chevaux… donne un jeu pas super joli globalement. De 3, et ça c’est purement personnel, je n’ai pas l’étincelle qui me fait dire: « je veux rejouer à ce jeu là maintenant tout de suite à la seconde, pendant que j’écris ces lignes, sans quoi je vais mouriiiiiiiiiiir ». Très subjectif donc, mais voilà on me paye pour me donner mon avis donc je le donne. Ha non correction, sorry, le patron de Vin d’jeu me confirme à l’instant que je ne suis pas payé en fait, dommage.
Mais clairement un très très bon jeu dans sa catégorie.
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