Trismegistus: L’Ultime Formule
Auteur(s): Daniele Tascini, Federico Pierlorenzi
Illustrateur(s): Paulina Wach, Pawel Niziolek
Editeur(s): Board&Dice, Pixie Games
Distributeur(s): Pixie Games
Mécanisme(s): Asymétrie construite, Asymétrie de départ, Dés communs, Points d'action, Transformation de ressources
Contient du plastique
SwatSh: 9,5/10
Avec Barrage, Trismegistus est certainement un des meilleurs si pas le meilleur jeu sorti à Essen cette année! Bon, on n’a pas encore su jouer à tous les jeux intéressants, il nous manque encore Maracaibo, Dreamscape, Cooper Island et The Magnificent mais l’étau se resserre 😉
Déjà sur papier, Trismegistus a tout pour plaire. Tout comme pour l’excellent Teotihuacan (Vin d’jeu d’coup d’cœur 2019), Trismegistus L’Ultime Formule est issu de la collaboration entre Board & Dice et Pixie Games. De plus, il a été réalisé par Daniele Tascini, l’auteur de bombes ludiques telles que Teotihuacan bien sûr mais aussi Tzolkin (Vin d’jeu d’l’année 2013) et Les Voyages de Marco Polo.
Dans Trismegistus, vous allez mélanger vos ingrédients et les transformer pour réaliser des formules qui vous feront gagner des bonus et des PVs en fin de partie. Un peu comme dans le Vin d’jeu d’l’année de cette année Coimbra, le cœur du jeu est une mécanique de choix de dés mis en commun mêlée à un système de points d’action.
Les dés veulent tout dire
Le choix d’un dé a de multiples conséquences. En fonction du nombre de dés présentant la même face disponible, on aura plus ou moins de points d’action. Si, lorsqu’on choisit un dé, il en reste 4 de la même face dans le pot commun, on aura 4 points d’action, s’il n’en reste que 2, on n’aura que 2 points d’action. Les points d’action sont primordiaux et on choisira, bien souvent, un dé présentant une face populaire 😉 Le choix est donc assez simple bien qu’il ait de multiples conséquences puisque les actions sont fonction de la face et de la couleur du dé choisit.
Multifaces & multi-effets
Avec les dés, on va pouvoir réaliser pas mal d’actions différentes chacune avec de multiples conséquences. Outre la simple récolte de ressources, vous allez pouvoir transformer vos ressources ce qui va engendrer des effets puissants grâce à vos artéfacts. En effet, vous allez également pouvoir acquérir des artéfacts qui vont déclencher leurs effets dès l’acquisition. Chaque artéfact apporte des effets différents qui vont en plus être de plus en plus puissants au fil de la partie. Une fois acquis, on va placer son artéfact sur un des 6 chemins de transformation de ressources. A chaque fois qu’on transforme une ressource en passant par l’artefact, on active l’artefact et on le retourne pour indiquer qu’on ne pourra plus l’utiliser à ce tour. Une action, qu’on néglige peut être trop souvent, permet néanmoins de retourner un artefact face visible et donc d’actionner son effet plusieurs fois. Et attention car ces artefacts vont également permettre de réaliser d’autres actions qui pourront également avoir d’autres sous-effets! Bonjour les combinaisons!
Vous allez également pouvoir acquérir des cartes potion et les réaliser contre les ressources exigées. Ces potions, une fois construites, vont également apporter de multiples effets qui vont potentiellement pouvoir en déclencher d’autres. Réaliser une potion va vous libérer une formule qui va vous donner des habilités « one shot » qui vont se placer dans votre coffre qui, lui-même, va vous apporter des actions supplémentaires lorsque chacune de ses lignes et colonnes seront complétées.
Actions réactions
Outre les multiples actions et leurs multiples conséquences, vous allez pouvoir réagir aux actions adverses et en profiter. Autrement dit, même si vous choisissez un dé au détriment d’un autre qui vous intéressait également, vous allez pouvoir en profiter même si un adversaire le choisit grâce à votre capacité, limitée, de réaction. Magnifique idée.
Ergonomie
Le défaut très frappant du jeu est son ergonomie. Déjà, il est impossible de s’en sortir sans une bonne aide de jeu (je vous conseille celle de matg82, pas super jolie mais efficace, que vous pouvez retrouver ici). Ca n’aurait rien coûté d’indiquer les différentes actions qu’on peut faire sur un bord du plateau personnel des joueurs ou même sur une carte séparée. De plus, un rappel de certaines règles sur la matériel aurait été judicieux. Quand on transforme une ressource, non seulement on ne doit pas oublier d’activer l’artefact lié, mais on doit également dépenser un élément et monter sur une des échelles. Ces divers coûts et effets ne sont indiqués nulle part. Lorsqu’on décide de prendre des éléments ou de transformer des ressources, pour une action, on ne peut prendre que les mêmes éléments ou n’utiliser que la même flèche de transformation. Là aussi, aucun rappel de la règle n’est disponible, il faut s’en souvenir! Les jetons réaction n’indiquent qu’un éclair. Mais on ne peut pas copier toutes les actions, rien ne rappelle quelles actions on peut copier,… Bref, les règles de Trismegistus L’Ultime Formule sont déjà complexes en soi (elles s’expliquent en une heure), un rappel des éléments essentiels aurait été clairement le bienvenu. C’est le gros défaut du jeu et c’est ce qui m’empêche de lui donner un dix!
De plus, les règles laissent de multiples incertitudes. Il y a des contradictions et le plus fort ce sont les icônes qui ne sont pas toutes expliquées. On va devoir interpréter, ensemble, les tuiles avec plus ou mois de réussite.
A noter également que tout ceci doit être lié à une grande confiance entre joueuses car il est impossible de vérifier ce que chacun fait et si chacun respecte bien toutes les règles (un oubli peut facilement arriver).
Crescendo
Mais si on passe outre cette mauvaise ergonomie, Trismegistus est une petite merveille. Vous allez pouvoir augmenter votre capacité de réaction, augmenter le pouvoir de vos actions, augmenter le pouvoir de vos artéfacts ou de vos potions,… Trismegistus offre la panoplie complète du parfait jeu expert: une montée en puissance savoureuse, des choix difficiles, des multiples effets pour chaque choix, des combinaisons à optimiser, des objectifs privés qui vont dans tous les sens et des pouvoirs asymétriques qu’on va acquérir en cours de partie, tout ça pour un plaisir ludique époustouflant!
Chaps: 8/10
Trismegistus a pour moi un très bon point qui est une sensation originale de jeu et beaucoup de stratégie. L’utilisation des dés et le fait que tout soit lié, le symbole, la couleur, le lieu où on le prend sur le plateau principal si on cible une carte expérience…Vraiment très bien.
En plus je trouve le matériel de très bonne qualité, agréable à manipuler.
Ensuite le système de transmutation aussi est bien trouvé, on est dans le thème on a des mécaniques originales et toujours beaucoup de stratégie. Il faut bien prévoir ce que l’on va faire et surtout optimiser : déclencher des actions en cascade, je valide une carte expérience, je prends un cube formule, j’active son bonus, je le pose finis une ligne et/ou colonne et je déclenche les bonus… Très agréable d’aboutir à cela en utilisant toute la richesse mécanistique du jeu.
Mais le jeu est très très tendu, nos matériaux disparaissent attention à ne pas se retrouver avec 2 pauvres cubes sur son plateau, la puissance des cubes file trop vite, beaucoup trop vite, si peu d’actions, tellement à faire…
On a l’impression que l’on arrivera à rien faire et parfois si l’on s’y prends mal c’est le cas… Cette tension forte personnellement me gâche un peu le plaisir, je préfère à chaque manche un jeu stratégique où je vais optimiser mes coups avec des objectifs en tête, avoir toujours des choses à faire mais à bien faire, sentir une construction, un moteur qui ronronne de plus en plus fort. Trismegistus fait partie des jeux où je me sens parfois pieds et poings liés avec beaucoup de mal à arriver à me décoincer pour finir dans un « ouf… » ok j’ai réussi à faire ça. Cette « souffrance » me plait moins qu’avant je préfère plonger dans l’ambiance d’un jeu riche où je me sens libre de développer au mieux une stratégie, où ce n’est pas facile mais on a moultes chemins à emprunter et à nous de bien le faire, avec Trismegistus j’ai trop eu la sensation d’être coincé et de me dire que je ne vais jamais y arriver. Au final j’y suis arrivé pas trop mal mais la frustration de ramer un tantinet avant de voir le ciel se dégager me gâche un peu le plaisir. Long paragraphe car c’est très personnel et en plus sur une première partie donc avec un jeu que je ne connaissais pas, donc après d’autres parties et une meilleure maitrise peut-être que je mettrais de l’eau dans mon vin, surtout avec un jeu aux mécaniques que j’ai trouvé originales et donc prenantes. Mais en attendant je reste sur un peu trop de « souffrance » même si au final ma partie n’a pas été une catastrophe en points. Et bien sûr aujourd’hui la concurrence ludique est si forte que l’on devient exigent…
Philrey: 8,5/10
SwatSh et Ren sont revenus de Essen (2019) en annonçant que Trismegistus sentait bon « la bombe » ludique. Avec une annonce comme ça, on ne peut qu’être impatient d’y jouer. Chose faite 😉
Alors, personnellement, je reste un peu mitiger après notre partie. Je peux énoncer les éléments qui m’ont séduit.
Tout d’abord, on retrouve les dés à valeurs multiples et à 3 couleurs. Ces deux éléments sont importants car le choix influencera l’action que le joueur peut faire. On a déjà expérimenté cela dans Coimbra, par exemple.
Ensuite, les actions « réaction » que l’on peut effectuer lors du tour d’un adversaire. Il faut évidemment dépenser un jeton pour pouvoir le faire mais c’est une mécanique qui permet de « briser » l’attente de son tour. Ce que j’apprécie beaucoup d’ailleurs.
Enfin, plusieurs stratégies sont possibles. Dans notre partie, tous le monde me voyait bien à la ramasse. Mais je gardais l’accomplissement de mes objectifs bien secrets. Au décompte, je comptabilisait ainsi plus de 50 PVs, à la surprise générale. Cela ne m’a pas permis de passer en tête mais bien de finir deuxième, pas loin du tout du vainqueur et distançant de pas mal de points les suivants.
Il faut quand même savoir que c’est pas mal casse-tête. En effet, le choix des dés avec deux éléments à tenir en compte limiteront vos actions. Il faut donc bien choisir en connaissance de cause. Voir même anticiper le choix suivant possible, important aussi pour établir son plan d’actions.
En conséquence de ce dernier point, le jeu est lent et long. C’est pour moi ce qui me dérange le plus. Pour moi, les quelques derniers tours furent longs car chacun analysait les choix qu’il lui restait et calculait les PV à gagner pour chacun des choix afin de glaner 1 ou 2 PV de plus. Au final, 4 heures de jeu! Pour ce type de jeu, je trouve cela trop long. On n’est quand même loin d’un jeu de civilisation, réputés être longs.
En conclusion, Trismegistus offre beaucoup de plaisir ludique pour les gamers qui aiment se torturer un peu les méninges. Beaucoup de mécaniques, même si pas toutes innovantes, s’entre-mêle pour offrir une belle cohérence. Je referai volontiers une nouvelle partie, ce qui est un bon signe, pour essayer une autre stratégie et pour voir si on peut réduire la durée d’une partie.
Ren: 9/10
Trismegistus, rien que le nom annonce la couleur : on n’est pas là pour rigoler. Avant de commencer à jouer il va d’abord falloir apprendre à prononcer le nom du jeu. C’est parfaitement à l’image du jeu : avant de jouer il va falloir commencer par apprendre les règles, les comprendre et puis ne pas les oublier (on va revenir sur ce dernier point plus bas…).
Pas là pour rigoler ? Ben oui, dans Trismegistus on va récolter des ingrédients, les transformer puis les assembler pour gagner des points de victoire de différentes manières. Et autant vous prévenir tout de suite, on n’est pas dans du Party Game. On est dans du gamer de compétition, du lourd, du velu, du corsé. Avec une pointe de gingembre et un zeste de piment d’espelette.
3 tours, 3 choix par tour, simple! La bonne blague…
Le jeu se joue en 3 tours. Et à chaque tour chaque joueuse va choisir 3 dés, point à la ligne. C’est tout ? C’est tout. « Ben le jeu est super court alors ? » Ha non pas vraiment… Ces 3 dés vont vous ouvrir une multitude de possibilités. Les dés ont en effet 3 couleurs différentes, des symboles différents, et sont en nombre différent (selon le nombre de dés, tirés au hasard au début de chaque tour, qui ont le même symbole). Et ces différentes caractéristiques vont déterminer ce que vous allez pouvoir faire.
Le nombre de dés ayant le même symbole (au moment où vous choisissez le dé) va déterminer la force de votre dé. Si vous prenez un dé d’un pot où il y en avait 4, votre dé aura une force de 4. Ce qui signifie que vous pourrez faire 4 fois une action de force 1 liée au dé, ou une fois une action de force 4 liée au dé. Ou toute autre combinaison de votre choix.
La couleur du dé va déterminer quelles transformations de ressources vous pourrez effectuer.
Le symbole du dé va déterminer quelles ressources vous pouvez récolter et quelle potion vous pouvez acquérir (potion que vous pourrez réaliser en dépensant les ressources adéquates).
Ce mécanisme de choix de dés est tout à fait succulent, il y a une tension de ouf à chaque tour vu les possibilités multiples qui sont offertes. Et l’interaction, si elle n’est pas dingue, est quand même présente car il faut jeter un œil aux plateaux des autres joueuses pour essayer de deviner ce dont elles ont besoin. Et si on peut piquer un dé crucial sous le nez de son adversaire, on ne va pas se priver.
Ok pas si simple. Mais quand même simple! La bonne blague…
Bon ok super on choisit des dés, avec des possibilités multiples, mais on ne choisit toujours que 3 dés par tour, donc le jeu sera court alors ? Ha non pas vraiment, car il y a encore beaucoup, beaucoup d’autres choses à dire…
Tout d’abord les artefacts. On va pouvoir acquérir des artefacts, qu’on va placer autour de son plateau personnel, le long des routes de transformation de ressources. Chaque fois (une fois par tour en fait, car on retourne l’artefact une fois utilisé, mais on peut utiliser une action pour le remettre sur sa face utilisable) qu’on transformer les ressources en question, on bénéficiera de l’effet de l’artefact.
Les potions ensuite. On pourra acquérir des cartes potions pendant la partie (en fonction du symbole du dé choisi). Une fois réalisées (en fournissant les ingrédients ad hoc) les potions ont un double effet : elles donnent un ou des bonus immédiats. Et elles débloquent éventuellement des formules. Formules qui donnent un bonus à utiliser quand vous le souhaitez. Et formules que vous allez placer dans votre coffre, sur votre plateau personnel. Et une fois que vous remplissez des lignes et colonnes dans votre coffre (un peu comme les livres dans Newton), vous obtiendrez d’autres bonus ! A noter que chaque joueuse a un coffre différent (i.e. avec des bonus différents), ce qui augmente la rejouabilité (pas qu’il y avait un stress à ce sujet, rassurez-vous…).
Chaque joueuse a aussi des jetons réaction instantanée, qui vont permettre de copier une action jouée par une autre joueuse. Il y a également dans le jeu des jetons de modification de dés, qui permettent d’augmenter la force d’un dé choisi. On peut en recevoir plus via des bonus.
Il faut également mentionner les pistes d’éléments. Les symboles sont liés à des éléments. En fonction de certaines actions vous allez évoluer sur ces différentes pistes d’éléments. Dans chaque piste il y a une course pour des bonus, la première joueuse qui atteint le niveau requis reçoit le bonus. Et à la fin de la partie ces pistes permettent de marquer des points en fonction du niveau atteint.
Et last but not least (à mentionner vu que nous sommes dans un jeu d’alchimiste), on peut arriver à produire de l’or, or qui sera un joker pour n’importe quelle matière, qui sera nécessaire pour certaines potions, ou qui vaudra des points à la fin de la partie.
A la fin de la partie on marque des points pour les potions réalisées, pour l’avancée de complétude de son coffre, pour les cartes objectifs (personnelles), pour son avancée sur les pistes d’éléments…
Finie la bonne blague!
Et ? Et tout ça nous donne un brûle-neurones de première catégorie. Les possibilités sont immenses à chaque tour, les choix cornéliens. Oui il n’y a que 3 tours où on choisit 3 dés. Mais comme vous l’avez maintenant compris ces 3 tours avec 3 choix de dés ouvrent 13977676576358762972987029808928092809280982092802098209809280982092809220 combinaisons différentes !!! Combo. Maxi combo. Gold combo. Platinum combo. Combo interstellaire. You name it.
Il y a 2 défauts évidents au jeu. Ou plutôt un défaut et un point faible. Le point faible est lié au paragraphe précédent : les possibilités sont gigantesques. Et le choix des autres (« elle vient de piquer le dé que je voulais ») a un impact direct sur son jeu et ses choix. Du coup les tours de jeu peuvent être trèèèèèèèèèèèès longs. C’est un jeu où il est quasi impossible de jouer vite (sauf à vouloir jouer n’importe comment, mais dans ce cas cela n’a aucun intérêt). Du coup les parties peuvent être loooooooongues. Je n’ai aucun souci avec les jeux longs. Mais ici l’attente entre les tours m’a parfois légèrement pesé.
Et le défaut est bien évidemment l’iconographie et les rappels des règles. Dans les deux cas c’est poussif ou inexistant. Et totalement insuffisant pour un jeu qui sort en 2019.
Mais si vous êtes une joueuse velue, ces défaut et faiblesse ne doivent en aucun cas vous empêcher de jouer à ce jeu qui pour le reste est clairement une bombe ludique. Les choix sont immenses comme déjà dit. Les combos sont légion, et surtout (ce qui est pour moi une grande qualité) pas du tout évidentes dès la première partie. Vu la variété des possibilités et des manières de marquer des points, il sera très compliqué (sauf si vous êtes une génie) de comprendre immédiatement comment combiner les différents choix pour marquer le maximum de points. Donc il y a une grande courbe d’apprentissage. Dans le jeu en lui-même il y a une montée en puissance délicieuse. Première action, premier tour : vous récoltez gentiment des ressources. Troisième tour : vous claquez une potion à 15 points.
Trismegistus, un jeu long, mais booooooooon !!!